Amérique Latine: Interview de Stella Calloni

Publié le par cubasifranceprovence

Par Héctor Bernardo (Diario Contexto)

traduction Françoise Lopez

- Qu'est-ce que la contre-rébellion?

- La contre-rébellion est une doctrine qui s'est établie à partir des années 60 après le triomphe de la Révolution Cubaine. Il s'agit d'une série de méthodologies mises en place pour éviter que surgissent d'autres gouvernements qui désobéissent aux ordres des Etats-Unis et à leur schéma de domination.

La contre-rébellion comprend des actions de toute sorte: politiques, économiques, culturelles, militaires et psychologiques pour attaquer un gouvernement déterminé. C'est un schéma d'attaque permanente contre tout pays ou gouvernement qui voudraient sortir de al dépendance des Etats-Unis.

- Un exemple de contre-rébellion?

- Tout ce qui a été fait contre Salvador Allende, même avant qu'il soit président du Chili. Là, on a financé les secteurs civils, paramilitaires et para-policiers pour qu'ils réalisent des attaques et des sabotages. La plus emblématique de ces attaques fut l'assassinat - en 1970 - du commandant en chef de l'Armée René Schneider, un militaire fidèle aux institutions. Après l'accession d' Allende, ils ont commencé un sabotage permanent de son gouvernement. Ils ont appliqué une guerre économique, ils ont infiltré les syndicats comme celui des camionneurs, ils ont utilisé les médias pour discréditer sans arrêt le gouvernement - le journal El Mercurio en est un exemple -. Tout cela financé par l'Agence Centrale de Renseignement nord-américaine (CIA) à travers l'ITT Corporation (International Telephone & Telegraph), une des grandes entreprises transnationales des Etats-Unis, et l'Agence Internationale pour le Développement. Toute cette attaque contre-rébellion qui comprend des sabotages terroristes, dégénéra dans le coup d'Etat militaire de 1973 contre Salvador Allende.

Quand on regarde ce qui s'est passé au Chili et qu'on le compare à ce qui se passe actuellement au Venezuela, on voit que c'est exactement la même chose: pénurie, sabotages, désinformation etc...

- L'opération Condor fait-elle également partie de cette structure?

- L'opération Condor fut un excellent exemple d'une tactique de contre-rébellion. Les dictatures militaires d'Amérique Latine se sont unies pour cette opération conjointe qui était comme une omerta mafieuse dans laquelle tous allaient être responsables des assassinats qui ont été commis au nom de la Doctrine de Sécurité Nationale des Etats-Unis. Il y en a qui veulent confondre et parlent de la doctrine française qui est une doctrine de guerre contre-rébellion qui, comme d'autres identiques, fait partie des enseignements de l'Ecole des Amériques. Sans doute dans les années 60, les militaires argentins, par exemple, ont étudié en France et ensuite tous ceux qui se sont rendus à l'Ecole des Amériques dans le Commando Sud ont aussi étudié cette doctrine française, en particulier ce qui concerne la contre-rébellion urbaine. Mais ce ne fut pas la France qui a imposé les dictatures du Cône Sud. C'est aussi de la contre-rébellion de tenter de cacher la responsabilité des Etats-Unis dans la naissance et la subsistance de nos dictatures.

- Quel rôle jouent les médias?

- La concentration des médias fait partie de ce schéma contre-rébellion non seulement en Amérique Latine mais dans le monde entier. Pendant cette période de l'histoire, le pouvoir hégémonique gère 95% de l'information qui circule dans le monde. L'information est traitée dans les bureaux militaires mêmes du Pentagone.

- Que peut-on faire pour affronter cette doctrine contre-rébellion?

- D'abord, les gouvernements de la région doivent évaluer clairement la situation actuelle et les véritables dangers. Il faut prendre comme exemple ce qu'a fait le président Evo Morales, qui a expulsé de Bolivia la CIA, la DEA et l'USAID. Et quand il a découvert qu'on tentait de fomenter un coup d'Etat depuis l'ambassade des Etats-Unis, il n'a pas hésité à expulser l'ambassadeur.

De plus, actuellement, les droits des régions dépendent absolument du financement, de l'assistance et des ordres extérieurs. En Argentine, nous en avons un très bon exemple avec l'opposition qui répond aux fonds vautours qui tentent d'attaquer ce pays pour une dette contractée de façon totalement illégale.

Nous devons être tout à fait prêts à affronter ces situations. Il n'est pas possible qu'ils fassent au président Maduro la même chose qu'à Salvador Allende il y a 40 ans et que nous ne réagissions pas. Il semble que nous n'avons rien appris.

tous les organismes d'intégration de la région doivent se mettre d'accord pour combattre les plans contre-rébellion qui menacent nos peuples.

Il sutilisent toutes leurs ressources. Ils ont infiltré les gauches. Nous le voyons ces jours-ci en Equateur, dans le plan contre-rébellion qui est mené contre le Gouvernement. Il y a quelques jours, on a pu voir qu'il y avait des marches de droite et des gauches radicales contre le Gouvernement du président Rafael Correa. Il faut aussi avoir de cela une définition claire: un secteur n'est pas de gauche parce qu'il le dit mais parce qu'il démontre dans les faits qu'il l'est. Une gauche qui roule avec la droite ne peut pas s'appeler une gauche parce qu'elle a perdu ses caractéristiques et ses principes.

Source en espagnol:

http://www.diariocontexto.com.ar/2015/07/07/si-camina-con-la-derecha-no-puede-llamarse-izquierda/

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