Venezuela: Le para-militarisme existe bien que la Colombie ne le nomme pas
par Nazareth Balbas
traduction Françoise Lopez
Caracas, 07 Sep. AVN.- Comme s'il s'agissait d'un simple ajustement sémantique, par la loi 975 de 2005, la Colombie a "éliminé" le para-militarisme. Dans cet instrument juridique promulgué sous le gouvernement d'Alvaro Uribe Vélez, on supprime le terme et on lui substitue celui d' "organisations criminelles qui se consacrent à la contrebande et au trafic de drogues". Les récentes déclarations de la chancelière colombienne, Maria Angela Holguin, l'ont confirmé.
Lors d'une conférence de presse donnée jeudi dernier, la chef de la diplomatie colombienne a assuré qu'avec cette loi, la Colombie avait éradiqué le para-militarisme parce que maintenant, "nous n'utilisons plus ce terme".
Holguin a répondu ainsi à la demande du Venezuela de chercher une solution conjointe sur la frontière pour combattre ce fléau après que 3 fonctionnaires de ses Forces Armées aient été attaqués par des groupes paramilitaires alors qu'ils accomplissaient des actions de sécurité contre la contrebande d'extraction.
Face à cette attaque contre la souveraineté et la sécurité du Venezuela, le chef de l'Etat vénézuélien, Nicolas Maduro, a ordonné de fermer la frontière dans l'état de Tachira, une mesure qui a été étendue jusqu'à nouvel ordre vendredi 21 août denier.
Cependant, la para-militarisme colombien est plus qu'un sujet sémantique. Des données du Parquet Général colombien précisent que depuis les années 90 jusqu'en 2010, plus de 21 000 homicides ont été perpétrés par ces groupes en marge de la loi. Les preuves de cette horreur sont dans les 3 200 fosses communes découvertes et dans les nombreux feuillets qui contiennent les confessions concernant es disparitions, les enlèvements, les viols, les tortures, l'utilisation des fours crématoires et d'autres pratiques contre le peuple colombien.
Le projet d'Uribe
L'écrivain et journaliste colombien Leon Valencia, dans un article publié dans le livre Las perlas uribistas (2010) (Les perles d'Uribe) parle de la stratégie de l'ex président colombien pour faire disparaître les structures visibles de ces organisations "et chercher l'entrée de leurs chefs dans la vie civile, ce qui laissait intact leur énorme fond de richesses et leur pouvoir politique".
Ce mécanisme, raconte Valencia, a été mis en place par la loi 975. Cet instrument juridique, présenté par Uribe devant le Congrès, permettait aux paramilitaires de rester sous la protection du prétexte de "sédition", d'être dispensés d'avouer leurs crimes pour obtenir des avantages lors de leur procès et de considérables réductions de peines.
Cependant, la Cour Constitutionnelle a émis ensuite une sentence contre ces exemptions. En même temps, le tribunal suprême de ce pays a entrepris des investigations sur les liens entre les paramilitaires et les hommes politiques. Cette action a permis de découvrir les négociations que le gouvernement d'Uribe avait menées avec les chefs du para-militarisme.
Les décisions des 2 Cours furent considérées par les chefs paramilitaires comme une "trahison" de la promesse d'Uribe d'une réinsertion tranquille. La conséquence était prévisible: les organisations ont repris leurs activités criminelles.
Comme exemple de cette erreur, Varela cite le cas de Medellín, où Uribe et le haut commissaire à la paix ont convenu avec Diego Murillo, alias don Berna, de la démobilisation des blocs Cacique Nutibara et Héroes de Granada, "mais ont laissé intacte ce qu'on appelle "Oficina de Envigado", c'est à dire la structure mère de tout le para-militarisme dans la ville".
Après le retrait des paramilitaires des négociations, la criminalité s'est à nouveau déchaînée dans cette zone et is ont repris le contrôle des quartiers "lors d'une escalade de violence qui a ramené les homicides au niveau où ils étaient en 2003".
Cependant, la solution que trouva Uribe à ce moment-là pour "minimiser le phénomène et cacher l'échec des négociations avec les paramilitaires" est la même que celle qui est appliquée par l'actuelle administration de la Casa de Nariño: donner un autre nom à ces groupes violents en marge de la loi.
"Il a donné le nom de Bandes Criminelles au Service du Trafic de Drogues (BACRIM), aux nouveaux groupes et il a insisté à nouveau sur le fait que c'est une réalité totalement différente des Autodéfenses Unies de Colombie. Mais ce qui est sûr, c'est que ces organisations font des choses très semblables à celles que faisaient les anciens paramilitaires."
Dans ce même article, le journaliste ajoute que cette situation de débordement criminel de a part des paramilitaires se répète "dans des villes comme Cali, Barranquilla, Montería, Carthagène, dans des zones du sud du pays Llanos Orientales, Magdalena Medio et à la frontière avec le Venezuela.
Construction d'une nouvelle frontière
La violence croissante produite par l'action des paramilitaires n'a pas été dénoncée par le Venezuela seulement dans le cadre bilatéral. La semaine dernière, en Chine, leprésident vénézuélien, Nicolas Maduro, a rencontré le secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies (ONU), Ban Ki-moon, pour exposer les édfis qu'affronte le pays dans la zone limitrophe avec le pays voisin.
Maduro a expliqué à Ban Ki-moon que sur la bande de 2 219 km qui réunit les 2 pays, "les paramilitaires, les contrebandiers et les trafiquants de drogues gouvernent parce qu'eux (le gouvernement colombien) ont abandonné la frontière".
Quelque jours avant que les tensions diplomatiques entre Caracas et Bogota ne s'aiguisent, la chancelière vénézuélienne a demandé à la Colombie - entre autres demandes - qu'on lui remette la liste des paramilitaires démobilisés pour pouvoir envisager une stratégie conjointe qui permettrait de réduire la violence de ces groupes contre la population qui vit dans la zone limitrophe.
Selon les données du gouvernement colombien, dans ce pays, plus de 31 600 paramilitaires ont été démobilisés. Cependant, dans la lettre envoyée en 2006 par Ivan Roberto Duque, un paramilitaire colombien des Autodéfenses Unies de Colombia (AUC), le haut commissaire Luis Carlos Restrepo informe que les chefs de ces organisations étaient plus de 40 et que dans les prisons, il y en avait seulement 19.
L a moitié de ce commandement, exclu des listes de "Justicia y Paz", sont retournés à leurs activités armées: "L'essor de la violence en 2009 montre également que la diminution des actes criminels fut temporaire dans beaucoup de régions, ce qui ratifie les affirmations de Báez", souligne Varela dans cet article.
Un rapport du Comité de l'ONU contre la Torture, divulgué en mai de cette année, a alerté que les "déficiences" qu'il y eu dans le processus de démobilisation des paramilitaires.
Cet organisme a manifesté, en plus, son inquiétude parce que le processus "avait laissé impunis de nombreux crimes commis par des membres des groupes paramilitaires, refusant ainsi aux victimes le droit à une véritable réparation", a souligné le journal El Colombiano à l'époque.
Selon des données officielles, face à 266.552 plaintes déposées entre 2010 y 2013, seulement 10.671 condamnations ont été prononcées.
Dialogue futur
Face à ce panorama, le position du Venezuela a été de reprendre le dialogue pour trouver ensemble une solution conjointe au problème de la violence sur la frontière commune.
"Je lance à nouveau un appel au président Santos. N'ayez pas peur du dialogue, Président! Ce n'est que par le dialogue que vous et moi pourrons trouver la solution. Je suis disposé à m'asseoir et à parler avec vous où vous voudrez, quand vous voudrez et comme vous voudrez", a ajouté Maduro.
Ce lundi, après les appels réitérés de Maduro à se rencontrer face à face, Santos a accepté de s'asseoir pour résoudre le différend avec la médiation de l'Uruguay.
"La semaine dernière, j'ai reçu un appel du président de l'Uruguay, Tabaré Vazquez, qui offrait ses bons offices pour faciliter un dialogue avec le Venezuela. J'ai accepté son offre et je lui ai dit que la réunion pourrait même se dérouler à Montevideo s'il le considère comme nécessaire", a déclaré Santos qui a remercié les deux pays et les organismes qui ont aussi encouragé la proposition d'une rencontre bilatérale.
Source en espagnol:
http://www.avn.info.ve/contenido/paramilitarismo-existe-aunque-colombia-no-lo-nombre
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