LE SIDA EN 2012
José A. de la Osa
« APRÈS plus d’un quart de siècle de la découverte du virus qui provoque le sida par le médecin et virologue français Luc Montagnier, comment évaluez-vous la situation de cette maladie ? ai-je demandé à La Havane à la Dr Isela Lantero Abreu, spécialiste en épidémiologie, chef du département des MST-VIH-Sida, du ministère de la Santé publique.
« Selon le rapport mondial 2011 du Programme conjoint des Nations unies pour le sida (ONUSIDA), on estimait à 34 millions le nombre de personnes vivants avec le VIH, à 1,8 million, les personnes décédées de causes liées au sida, et 2,7 millions de nouvelles infections par VIH, dont 400 000 enfants », a-t-elle indiqué.
« Même si dans le monde on constate des avancées concernant l’accès aux soins, et une diminution de la transmission mère-enfant, seules 48% des femmes enceintes ont reçu le traitement adapté pour empêcher l’infection de l’enfant à naître. »
LA SITUATION À CUBA
« Dans notre pays, des grands efforts sont réalisés et des ressources importantes sont destinées à pérenniser les progrès déjà réalisés, réduire l’impact social et économique de l’épidémie, et garantir la prise en charge intégrale de toutes les personnes infectées », a-t-elle expliqué.
« La population est largement informée ; depuis ces dernières années, davantage de personnes utilisent des préservatifs, et les actions éducatives mises en place touchent plus de monde. Cependant, la perception du risque de contracter le sida n’a pas augmenté suffisamment parmi la population », a-t-elle expliqué.
Chaque année, des personnes sont diagnostiquées positives au virus VIH ou décèdent du sida, des hommes et des femmes qui avaient l’information, qui savaient comment éviter l’infection, mais qui ne se protégeaient pas régulièrement.
À Cuba, plus de 85% de ces personnes ont entre 15 et 49 ans. Les autres ont plus de 50 ans, avec une certaine tendance à l’augmentation ces dernières années des hommes et des femmes de plus de 60 ans, et sur 10 personnes porteuses du virus du sida, 8 sont des hommes.
La Dr Lantero a révélé également que dans notre pays, environ 9 hommes sur 10 ont été contaminés à la suite de relations sexuelles non protégées avec d’autres hommes. L’interaction de facteurs biologiques, psychologiques et sociaux favorise leur plus grande vulnérabilité.
Le ministère a plusieurs priorités, selon le médecin : augmenter les campagnes de prévention, promouvoir l’utilisation du préservatif, faciliter l’accès à ce produit de santé, encourager l’éducation entre pairs et la participation accrue de volontaires aux actions de prévention.
Même si, a-t-elle reconnu, on pouvait affirmer «en théorie» que grâce aux progrès des traitements, le sida est devenu une maladie chronique, « elle reste une maladie incurable qui, avec un traitement, a une évolution chronique ».
« Cependant, le diagnostic du sida a un sens bien différent de celui du diabète ou de l’hypertension, aussi bien pour la personne concernée que pour ses enfants et sa famille, ses voisins, ses amis, ses camarades de travail ou d’étude. Faire face à cette réalité ne peut se réduire seulement aux progrès thérapeutiques.
Elle a expliqué ensuite que de simples analyses de laboratoire peuvent confirmer le diagnostic du sida. Aujourd’hui dans le monde, ce qui empêche le système de santé de prendre en charge davantage de malades et de prévenir la transmission dans la population, c’est que de nombreuses personnes ignorent qu’elles sont malades.
À Cuba, la population accède facilement aux services de santé ,et nos médecins sont au courant de l’importance d’offrir une information de base sur les maladies sexuellement transmissibles et le SIDA avant de proposer et d’indiquer le test du sida à toute personne sexuellement active qui n’utilise pas systématiquement préservatifs.
« Réaliser le test du sida et connaître son résultat doit être assumé par notre population comme une pratique habituelle de soin de santé à une époque où le
sida est présent parmi nous », a-t-elle conclu.