Cuba: LE CROCODILE VERT PLUS QUE JAMAIS LA BETE NOIRE...
par Françoise Lopez
Le 17 avril dernier, alors que s'engagent des négociations entre l'Union Européenne et Cuba pour rétablir des relations qui ne soient plus basées sur la « position commune » de triste mémoire, Laurent Fabius se rend à La Havane et y inaugure une agence d'Ubifrance dont le rôle sera d'aider les entreprises françaises dans leur approche du marché cubain.
Les négociations semblent donc s'annoncer sous les meilleurs auspices mais cela n'est pas du goût de tout le monde... C'est bien normal, me direz-vous, il y a toujours des nostalgiques, et alors ? Et alors, mais justement, voici... :
-Début mai, on apprend qu'une radio anti-cubaine, Radio Republica, émet depuis notre territoire national. Le 5 du même mois, André Chassaigne, député du Puy-de-Dôme mais surtout président du Groupe d'amitié France Cuba de l'Assemblée Nationale, interroge la ministre de la Culture, Aurélie Filipetti, sur la légalité de telles émissions. Sans réponse pour le moment.
-Pendant les 2 dernières semaines de mai, toutes les chaînes font en choeur la pub du dernier numéro de « L'Express » qui consacre sa couverture à «la vie de nabab de Fidel Castro » et publie de larges extraits d'un torchon anti-castriste intitulé « la vie cachée de Fidel Castro » qualifié pour l'occasion de « livre qui changera l'histoire » et qui reprend allègrement toutes les sornettes qu'on nous sert depuis 50 ans... L'auteur du «livre » est un ancien garde du corps de Fidel résidant, comme il se doit, à Miami... (et certainement grassement payé pour calomnier Fidel).
-Le 30 mai, les Etats-Unis infligent à la banque BNP Paribas une amende de 10 milliards de dollars pour avoir réalisé des transactions avec Cuba. Cette amende, comme toutes celles qui ont été infligées aux entreprises étrangères faisant des affaires avec Cuba, est un moyen de pression couramment utilisé par les Etats-Unis pour obliger les pays tiers à respecter un blocus illégal condamné depuis plus de 20 ans par l'unanimité des pays de l'ONU (à l'exception du pays qui l'a décrété et de ses laquais!) et nous savons qu'en ce moment aussi ont lieu des négociations sur le traité transatlantique...
Cela fait beaucoup d'attaques contre Cuba en un peu plus d'un mois mais ce n'est pas un hasard. Les négociations qui se déroulent en ce moment entre l'Union Européenne et Cuba doivent à tout pris être sabotées et les Etats-Unis s'y emploient du mieux qu'ils peuvent. Mais seuls, ils ne peuvent pas grand-chose et ils ont donc besoin de complices et de médias à leur botte.
Car Radio Republica est, naturellement, financée par la « Fondation nationale pour la démocratie », relais bien connu de la CIA. Il reste la question de savoir pourquoi le gouvernement français a accordé son autorisation mais ceci est une autre histoire...
Une autre histoire aussi la vente d'Alsthom à l'entreprise étasunienne General Electric qui va mettre Cuba en grande difficulté. Comme l'indique André Chassaigne dans son texte "Le scandaleux blocus de Cuba", "Alstom assure en effet en exclusivité la maintenance, avec fourniture de pièces de rechange, d’une centrale thermoélectrique qui fournit plus de 10 % de l’électricité cubaine, dont la quasi-totalité de la consommation domestique de La Havane. Toute solution de rechange est d’ores et déjà bloquée par le repreneur américain d’Alstom." Aucun commentaire pour l'instant, du Gouvernement français, principal actionnaire d'Alsthom...
Tout cela ne peut être que concerté. Mais pourquoi le crocodile vert est-il devenu la bête noire des Etats-Unis ? Parce qu'il est communiste ? On voudrait nous le faire croire mais les Etats-Unis ne se conduisent pas de la même manière avec la Chine, par exemple. Certes, la Chine est plus puissante que Cuba et un différend avec elle aurait des conséquences bien plus graves mais ceci n'explique pas tout.
Alors, parce que Cuba est un mauvais exemple pour l'Amérique Latine et le monde qui, à son contact, pourraient comprendre que l'indépendance, la dignité et l'autodétermination des peuples sont une réalité et peuvent aussi exister dans les autres pays?
Certainement pour une part. Mais il y a peut-être une autre raison, plus terre à terre et sans doute plus réaliste, connaissant les Etats-Unis et leur obstination à implanter à l'étranger leurs entreprises, par la force si nécessaire.
Il faut se poser la bonne question, celle que tout enquêteur rigoureux se pose: à qui profite le crime? Que rapporte aux Etats-Unis le fait d'interdire aux autres pays d'avoir des relations avec Cuba ?
Eh bien, tout bêtement cela leur donnera le monopole des relations avec Cuba au moment où ils le décideront. Quand cela leur plaira, ils lèveront le blocus et leurs entreprises pourront alors se ruer sur Cuba sans aucune concurrence puisque personne n'aura pu, avant eux, y établir des liens... Et ils seront les maîtres.
Mais le crocodile vert n'a pas dit son dernier mot et nous non plus... C'est le moment de soutenir Cuba avec toutes nos forces vives et toute notre obstination. Ne laissons pas notre pays se rendre complice de ce crime!
Françoise Lopez
8 juillet 2014