Cuba: LA SOCIETE CIVILE ET LA CONTRE-REVOLUTION
traduction Françoise Lopez
Je me souviens toujours de l'étonnement avec lequel m'a abordé un camarade très cher quand il a lu mon article où je disais que la contre-révolution n'existe pas, n'a jamais existé. COMMENT COMPRENDRE CELA SI NOUS AVONS TOUJOURS PARLE DE CONTRE-REVOLUTION CUBAINE?
La contre-révolution peut aussi être légitime. Dans la mesure même où une classe est chassée du pouvoir par une révolution, elle se propose de le récupérer. Elle organise ses forces, les dote d'un programme, d'un discours propre, définit et génère un leadership et, en tant que partie d'un mouvement politique, se met au travail.
Mais dans le cas de Cuba, la situation historique a été différente.
En premier lieu, celle qui a pu être la classe bourgeoise nationale s'est suicidée en plusieurs occasions. La première fois, quand, en tant que riches propriétaires fonciers créoles de l'occident, elle n'a jamais soutenu la lutte pour l'indépendance et a commencé à le faire quand elle a vu que l'Espagne perdait la guerre face aux troupes de l'Armée Libératrice. Elle a commencé à envoyer ses représentants bien vêtus et rasés qui, en plus, tout de suite semblaient faire étalage de grades militaires sans avoir tiré un seul coup. Ce qui a toujours provoqué la colère de Maximo Gomez.
La partie la plus patriotique et révolutionnaire de ces riches propriétaires fonciers, ceux de l'orient, avec Carlos Manuel de Cespedes à leur tête secondé par Ignacio Agramonte, étaient trop pauvres pour aspirer à avoir la première place dans cette lutte. Ils se sont levés contre le pouvoir espagnol, se sont battus comme des lions, ont formé un gouvernement de la République en Armes. Mais leurs sucreries étaient les plus petites, leur production de sucre aussi et l'éloignement de la capitale les désavantageait. Ensuite, celle qui a pu être la bourgeoisie nationale n'a pas réussi à atteindre cette catégorie. Et celle qui avait le pouvoir économique nationale pour l'être, a préféré attendre avec une attitude réformiste et ensuite se mettre aux mains des Etats-Unis.
Ont prédominé finalement, du point de vue économique et idéologique ceux qui ne voulaient pas voir la fin de l'esclavage, que la lutte pour l'indépendance arrive à l'ouest et aspiraient seulement à expulser l'Espagne de Cuba pour être dominés, protégés sous le parapluie de l'intervention nord-américaine, comme cela arriva finalement.
Ils ne furent pas alors nos véritables patriotes, dans leur immense majorité, ceux qui arrivèrent à la république et profitèrent du pouvoir ou de la part de pouvoir que l'Armée nord-américaine leur laissa. Ce furent les pro-annexionnistes, les esclavagistes à outrance et les ex autonomistes, les Cubains de 7 mois, comme Marti appelait nombre d'entre eux. Il est très intéressant que le premier cabinet d' Estrada Palma ait été composé de figures provenant de l'autonomisme.
Le second suicide a eu lieu quand cette même bourgeoisie, déjà à l'intérieur de la république, contrôlée par les yankees, appelons-la créole, a soutenu la dictature de Batista jusqu'à ses ultimes conséquences et partit de Cuba avec Batista quand les troupes de l'Armée Rebelle ont commencé à entrer dans La Havane. Selon eux, ils partaient pour peu de temps parce que l'armée nord-américaine allait leur rendre leurs privilèges.
Quelle fut alors la classe chassée du pouvoir qui voulut organiser la contre-révolution à Cuba pour reprendre le pouvoir? En réalité aucune. Ce furent les Etats-Unis qui organisèrent la contre-révolution, la financèrent et la soutinrent politiquement et moralement dès le début, en utilisant alors comme chair à cannons tous ceux, y compris ceux qui avaient été chassés du pouvoir, qui étaient disposés à combattre contre la révolution.
Les Etats-Unis organisèrent la contre-révolution, étouffant au berceau ce qui avait pu être leurs aspirations légitimes. La contre-révolution qui émergea alors n'était pas cubaine. Il s'agissait plus d'un mercenariat camouflé en contre-révolution. Regardez comment, au moment de l'Invasion de Giron, le soi-disant gouvernement qui chasserait l'autorité révolutionnaire était écartelé à Miami, attendant qu'on le transporte dans la petite république qu'ils fonderaient dans la Cienaga de Zapata. Alors, oui, les fils de nombreux propriétaires terriens, bourgeois et opportunistes sont venus combattre parce qu'il s'agissait que l'armée nord-américaine leur garantisse le triomphe.
Contre-révolution qui fut totalement vaincue en 1965 quand presque tous, y compris les bandits de l'Escambray ont préféré partir pour les Etats-Unis pour vivre là-bas des sornettes qu'ils racontaient sur ce qu'ils avaient fait à Cuba, soi-disant "en risquant leur vie" pour restaurer le vieux pouvoir. Un processus qu'ils n'ont jamais conduit, tous ayant terminé comme simples mercenaires payés par les Etats-Unis.
Maintenant, leurs maîtres ont changé de tactique, essayant de les placer sur le front de ce qu'on appelle al société civile, ce qui met en évidence ce qui a toujours été le problème de cette contre-révolution. Son problème, il n'est pas difficile de le voir, a toujours été l'absence de légitimité. Rappelons-nous que jusqu'en 1965, surtout, la politique nord-américaine a fait de gros efforts pour les faire apparaître comme des éléments d'une guerre civile entre Cubains en essayant de les doter d'une légitimité intérieure en tentant de les situer comme une opposition intérieure au régime politique cubain. En leur mettant des masques de société civile, un terme manipulé par les idéologues des Etats-Unis, comme si à Cuba, nous étions tombés dans le piège de nous appeler comme nous ne sommes pas et n'avons pas besoin d'être.
Nous, nous ne devons pas avoir de complexes à ce sujet. Cuba a une société civile qui n'a pas besoin de s'auto-qualifier ainsi car elle est plus que cela, il s'agit de la société révolutionnaire, composée par toutes ses organisations de toujours, auxquelles s'ajoutent à présent toutes les entités et les organisations sociales qui ont émergé pour enrichir la solidité et l'hétérogénéité du projet social de la révolution. Ne nous laissons pas tromper par des concepts légitimes mais intégrés dans une phraséologie manipulée. Nous, nous n'avons pas besoin d'y avoir recours pour être légitimes. Si nous sommes ou non une société civile, ce n'est pas le plus important car nous sommes une société révolutionnaire, surgie de la chaleur d'une révolution légitime.
De là l'insistance de la partie nord-américaine, à présent, pour discuter sur la démocratie, les libertés civiles et les droits de l’homme. Ils croient qu'avec cela, ils vont doter leurs mercenaires d'une plateforme idéologique qui leur permette de participer à la politique intérieure cubaine en tant que force d'opposition légitime.
C'est pourquoi la contre-révolution cubaine n'existe pas. N'a jamais existé. La politique nord-américaine l'a étouffée à la naissance. Ceux qui durant toutes ces années, jusqu'à maintenant (en changeant maintenant leur tactique de lutte) ont prétendu renverser ou perturber le régime politique révolutionnaire à Cuba ont fini par devenir un groupe de criminels qui ne peuvent même pas être appelés contre-révolutionnaires. Ils ne méritent pas cette catégorie politique qui leur donnerait une place dans la société civile cubaine. Non car ils ont fini par être simplement depuis le début ce qu'ils sont encore aujourd'hui, des mercenaires dirigés par la politique nord-américaine, que les Etats-Unis paient pour qu'ils appliquent un algorithme destructeur du régime révolutionnaire à Cuba. Ce ne sont pas des contre-révolutionnaires parce qu'en réalité, ce ne sont les représentants d'aucune classe chassée du pouvoir à Cuba. Ils n'ont rien à récupérer qui leur appartienne, en réalité ils n'ont rien perdu. D'autres ont perdu quelque chose qu'ils n'ont eu ni le courage ni l'intelligence politique de récupérer.
Obama affronte un grand défi politique dans les négociations qui sont menées à bien s'il prétend continuer à "engraisser" ses représentants à Cuba pour qu'ils arrachent aux autorités cubaines les changements qu'il faut faire de façon interne sur l'Ile. Ils ne pourront pas imposer de conditions pour cela et celui qui prétend le faire continuera à récolter l'échec d'une politique qui a déjà échoué et continueront à souffrir du cercle d'isolement qu'il sont déjà créé.
Ceux de maintenant gagnent simplement leur salaire de mercenaires, en vivent, c'est une rémunération pour ce qu'ils font, qui n'est pas une tâche politique digne qui leur donne une place à l'intérieur de Cuba, en tant que partie de la société cubaine. En réalité, ils ne font pas partie de celle-ci. De là qu'ils retournent à Miami, leur quartier général, une fois terminées leurs peu intelligentes provocations payées au récent VII° Sommet des Amériques.
La Havane, 23 avril 2015
(Publié dans Moncada, lectores en el mundo)
Source en espagnol:
https://lapupilainsomne.wordpress.com/2015/04/30/la-sociedad-civil-y-la-contrarrevolucion/#more-4912
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