Amérique Latine: Déclaration de Lima à l'occasion de la réunion annuelle du FMI et de la Banque Mondiale
traduction Françoise Lopez
Nous, les organismes sous-signé, réunis au forum social "En démentant le Miracle Péruvien" organisé par la Plateforme Alternative aux réunions annuelles du Groupe Banque Mondiale (GBM) et du Fonds Monétaire International (FMI) dans la ville de Lima du 7 au 9 octobre, exprimons devant les gouverneurs et autres autorités des deux institutions financières internationales et devant l'opinion publique en général ce qui suit:
CONSIDERANT
Que le système de gouvernance du FMI et du Groupe Banque Mondiale, deux des institutions le splus importantes de l'architecture financière internationale actuelle, n'est pas démocratique. On continue, à se baser sur le principe d'"1 dollar, 1 voix" par lequel les pays les plus riches contrôlent la prise de décisions qui ont un impact sur le monde entier. Toutes les réformes de vote et de quota approuvées jusqu'à présent n'ont été que de la poudre aux yeux.
Qu'après 70 ans d'existence, ni le FMI n'a aidé à maintenir la stabilité de l'économie mondiale en prévenant les crises cycliques du capitalisme en accomplissant sa fonction de suivi technique (il n'a pas évité ni alerté sur la crise asiatique de 1997 ni sur la crise russe de 1998 ni sur la crise argentine de 2001/2002, ni sur celle qui a éclaté aux Etats-Unis en 2007 à cause des sur-primes entre autres), ni la Banque Mondiale n'a réussi à en finir avec la pauvreté, au contraire, plus de 1 000 millions de personnes vivent dans la pauvreté et les inégalités augmentent (1% de la population mondiale possède 50% de la richesse).
Que les conditions de politique économique des prêts qu'ils offrent, ajoutées à des fonctions aussi sensibles que celles de dire quels pays doivent recevoir plus ou moins de ressources financières aussi bien de sources publiques que privées, leur a permis d'imposer des réformes structurelles dérivées du "Consensus de Washington" jusqu'à des politiques d'austérité pour affronter la crise économique actuelle que vit le monde et qu'ils n'ont pas aidé à prévoir. Cela a été le rôle réel tenu par ces 2 institutions.
Que l'application des mesures proposées par ce qu'on appelle le Consensus de Washington ont provoqué la précarisation du travail, la perte du droit à l'accès universel aux services de basiques de santé et d'éducation et ont donné la priorité aux intérêts du marché sur ceux des personnes. Ce consensus, avec les politiques d'austérité, est responsable de l'augmentation de l'exclusion et des inégalités au niveau global et en particulier en Amérique Latine.
Que la Banque Mondiale, ces dernières années, présente une tendance d'assouplissement des standards socio-environnementaux de leurs projets en les considérant comme un obstacle ou une exigence bureaucratique pour l'investissement. Cela a provoqué des conflits socio-environnementaux dans beaucoup de communautés et de secteurs sociaux et a influé sur les politiques de toute la banque de développement multilatéral et sur celle des Etats même. Ce processus de révision des sauvegardes environnementales et sociales du GBM se trouve dans cette tendance.
qu'aussi bien le GBM que le FMI sont assujettis au droit international et sont obligés de garantir et de respecter les normes nationales et internationales des droits de l'homme. En ce sens, on ne doit pas laisser aux seules mains des Etats l'application des standards environnementaux et sociaux mais ceux-ci doivent avoir un cadre de référence international stimulé par les institutions financières comme le GBM ou le FMI eux-mêmes.
Qu'au lieu de promouvoir et de financer la prestation de services de base comme la santé, l'alimentation et l'éducation pour la réalisation et le respect des droits de l'homme, une condition pour le développement complet des personnes, ils voient en ceux-ci une opportunité pour faire des affaires ou une niche de marché.
Que, bien qu'ils reconnaissent l'importance de l'égalité de genre pour le développement et le bien-être des pays, leur contribution est seulement considérée par rapport à la croissance économique.
Que, s'il y a des avancées dans la reconnaissance des droits de l'homme despopulations indigènes, la vulnérabilité de ces communautés demande une reconnaissance explicite, claire et sans exceptions à leur droit à la consultation libre, préalable et à l'information de la part du GBM, du FMI et de toutes les institutions qui font partie de l'architecture financière globale.
Que la banque Mondiale promeut l'investissement étranger dans de méga projets d'infrastructures d'un point de vue qui approfondit le modèle primaire d'exportation et qui, à travers des associations publico-privées (APP) augmente le coût des services publics, provoque des risques d'endettement, a des impacts socio-environnementaux, parmi d'autres aspects négatifs.
Que les politiques de sauvegardes du BGM ne sont toujours pas suffisantes pour protéger les droits de l'homme des personnes LGTBI, des handicapés, des femmes et d'autres groupes en situation de vulnérabilité affectés par les projets de la Banque. La protection légale de ces secteurs, en plus d'être une question de droits de l'homme, est aussi une question de justice économique.
Que le FMI et le GBM ainsi que toutes les institutions multilatérales doivent lutter contre les flux financiers illicites (FFI) provenant de la fraude et de l'évasion fiscale des entreprises transnationales, du blanchiment d'argent et de la corruption. Ce sont des millions de dollars qui sortent en tant que FFI desppays appelés "en développement" chaque année.
Que les politiques du GBM et du FMI encouragent l'augmentation des impôts à la consommation en réduisant ceux qui grèvent les bénéfices, renforçant la dégressivité des impôts dans beaucoup d'Etats.
Qu'il existe dans le monde de nombreux exemples comme celui de l'entreprise minière péruvienne où la Corporation Financière Internationale du GBM est associée ( Yanacocha, avec 5% de participations) et a facilité des lignes de financement, a été dénoncée par des organisations dela société civile pour l'évasion de l'impôt sur le rente. Cette même Corporation a fait partie de l'entreprise Off Shore “Peru Privatization Fund” (PPF), dénoncée par le Congrès péruvien de 2001-2006 comme un cas de corruption concernant la dette extérieure dans les années 90.
Que le rôle du GBM conernant les forêts présente de multiples visages. D'un côté, il est l'administrateur fiduciaire des différents fonds pour l'amélioration de la gestion de la forêt et pour la réduction des émissions provenant de la déforestation dans les pays développés, d'un autre, il stimule des activités qui exercent une grande pression sur la forêt comme l'exécution de mega projets d'infrastructures ou la stimulation de monocultures dont découle la dégradation des forêts.
Qu'au Pérou, les récentes mesures de normes (connues comme petits paquets) pour affronter la décroissance économique comme ce qu'on appelle la “Ley Pulpín”, qui prétendait réduire au minimum les droits du travail et les bénéfices sociaux des travailleurs et des travailleuses les plus jeunes (condamnée par une grande mobilisation sociale cette année), sont dans le cadre de la Banque Mondiale du point de vue de la flexibilisation du travail. Le processus de révision des sauvegardes environnementales et sociales du GBM sont aussi dans cette tendance.
Que le Pérou est l'un des pays où le travail est le plus flexible avec 40 régimes spéciaux, certains d'entre eux uniques au monde comme le régime d'exportations non traditionnelles qui touchent e secteur textile et agro-industriel, un produit de l'ajustement structurel exigé par le GBM et le FMI. Ainsi, ces politiques du travail ne favorisent pas le "travail digne" et ne respectent pas les standards et les accords internationaux de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) qui constituent les piliers essentiels des droits des travailleurs et des travailleuses. De même, dans le processus de révision des sauvegardes de la Banque Mondiale, on évite toute mention des droits standards et des accords. Et dans le rapport périodique "En faisant des Affaires" de la même Banque Mondiale, on évalue positivement les pays qui ont le plus dérégulé et flexibilisé le marché du travail.
Que, dans ces réunions annuelles qui ont lieu à Lima, le FMI et la GBM prétendent montrer le Pérou comme un exemple à suivre pour les autres pays. Pour cela, ils disent que la croissance économique du Pérou ces dernières années est en relation avec les politiques recommandées par ces institutions et non avec le super cycle de prix élevé des métaux. En plus d'être faux car tous les pays de la région ont eu de la croissance pendant cette même période sans nécessairement avoir suivi les politiques du FMI et du GBM, cela envoie un message trompeur pour établir les mesures réelles contre la crise.
Qu'il est possible que les pays soutiennent leur propre développement et sortent des crises enf aisant usage de leurs propres ressources sans le contrôle asphyxiant des plans d'austérité du FMI en mettant la volonté populaire et la souveraineté économique sur la table de négociation.
NOUS DECLARONS:
Qu'il est urgent et nécessaire que le FMI et le GBM se démocratisent en en finaissant en premier lieu avec ce qu'on appelle le "Pacte des Gentlemen" par lequel, pour plus de candidats qui se présentent pour diriger cette institution, l'Europe et les Etats-Unis finissent toujours par imposer les leurs en mettant en place une réforme réelle de ces institutions par un changement substantiel de la représentation es pays "en développement".
qu'aussi bien qe FMI que le GBM en tant qu'institutions avec un mandat de développement doivent rendre compte à tout moment aux citoyens de leurs opérations. Les voix de la société doivent avoir un espace important dans ces institutions et pas seulement 2 réunions annuelles.
qu'il est urgent et nécessaire que le FMI et le GBM respectent et accomplissement les nouveaux principes de base de la restructuration de la dette souveraine adoptés par la Résolution A/RES/69/319 de l'Assemblée Générale de l'Organisation des nations Unies en septembre 2015 pour en finir avec les fonds vautours, en particulier quand on signale qu'"Un Etat souverain a le droit, dans l'exercice de ses facultés discrétionnaires, d'élaborer ses politiques macro-économiques, et même la restructuration de sa dette souveraine, un droit dont il ne doit pas se voir privé et auquel on ne peut faire obstacle par des mesures abusives. la restructuration doit se faire en dernier recours en préservant depuis le début les droits des créanciers".
Qu'il est urgent que le FMI et le GBM assument leurs responsabilités dans la lutte contre les flux financiers illicites en mettant en place des mécanismes de transparence pour les transnationales afin qu'elles paient les impôts correspondant aux territoires sur lesquels elles obtiennent un revenu. La politique pour attirer les investissements étrangers ne doit pas être soutenue par des stimulants et des exonérations fiscales.
Qu'il est urgent que le GBM étudie le cas d'évasion fiscale de l'entreprise minière Yanacocha dont la Corporation Financière Internationale du GBM fait partie et qu'il évalue le rôle de la Corporation dans l'affaire PPF.
Que l’égalité de genre doit être considéré comme un principe d'exercice complet des droits de l'homme, des femmes et des enfants, incluant les droits sexuels et à la reproduction et à l'autonomie économique, dans toutes les politiques et dans tous les mécanismes des institutions financières.
Qu'on doit respecter et considérer la surveillance indigène des investissements étrangers dans les interventions du GBM et du FMI et encourager lespays qui veulent recevoir des prêts à apporter une protection légale à l'orientation sexuelle, à l'identité de genre et à d'autres secteurs de la population en situation de vulnérabilité. Le GBM et le FMI doivent inclure une référence explicite à l'identité et à l'expression du genre ainsi qu'à l'orientation sexuelle (de façon transversale) dans leurs politiques opérationnelles.
Que le GBM réduise la pression sur les forêts et contre la population qui dépend de celles-ci, sur la bio-diversité et sur les réserves de carbone. Au contraire, ils doivent agir de la façon plus cohérente dans la lutte contre le changement climatique, en particulier dans les zones couvertes de forêts, ce qui implique que les fonds actuels qu'il administre aient une meilleure coordination et ne doublent pas leurs efforts. De même, nous croyons important que le GBM s'assure une meilleure planification énergétique dans laquelle les énergies renouvelables seraient financées de manière claire et opportune et les subventions aux combustibles seraient réduites.
Que le GBM et le FMI ne continuent à encourager des politiques de privatisation des services publics et la flexibilisation socio-environnementale dans aucun pays du monde. Les APP doivent être étudiées au cas par cas et non imposées comme un dogme, en évaluant les coûts pour le secteur public, les impacts qu'ils provoquent et en établissant des mécanismes de transparence dans les contrats pour faciliter le contrôle citoyen.
Que la flexibilisation socio-environnementale que le GBM et le FMI avec le changement de leurs standards environnementaux et sociaux pour les investissements publics et privés nourrit les conflits socio-environnementaux comme ceux récemment vécus dans la région, en particulier au Pérou dans des projets miniers comme le projet Las Bambas dans lequel sont appliqués des instruments de gestion environnementale sans une gestion environnementale adéquate et sans participation des citoyens (par exemple, ITS).
Que, considérant cette tendance nationale, (et internationale), le renforcement de la part du GBM de procédures claires pour l'évaluation des risques environnementaux et sociaux de ses projets est important et de ne pas laisser ces processus uniquement aux mains des Etats.
Que le GBM et le FMI respectent et accomplissement dans toutes leurs opérations et dans toutes leurs recommandations de politiques les accords et les recommandations de l'Organisation Internationale du Travail en particulier en ce qui concerne la promotion du travail digne et décent.
Lima, 7 octobre 2015
source en espagnol:
http://www.plataformalternativa.com/movilizacion/declaracion-de-lima
URL de cet article:
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