LE Venezuela APRES LA BATAILLE ELECTORALE
Juana Carrasco Martin
QUELQUES semaines se sont écoulées, mais cela ne veut pas dire que tout est calme, car le Venezuela est et restera l’immense fourmilière que porte en son sein toute Révolution. Aujourd’hui, avec le recul, on peut mieux comprendre la signification de la victoire large, transparente, et publiquement reconnue par les adversaires du président Hugo Chavez Frias.
Le chavisme l’a emporté avec une marge beaucoup plus importante que ne l’avaient anticipé les médias de droite jusqu’au dernier jour, lorsqu’ils n’en avaient que pour Henrique Capriles qui, d’après eux, avaient rempli les rues, et ils se prononçaient pour un retour du « puntofijisme » – le Pacte de Punto Fijo de 1958, qui voulait que l’alternance se joue entre les deux partis principaux, l’AD (action démocratique) et le COPEI (parti social chrétien). Une illusion qui était loin de répondre aux attentes et aux aspirations des foules rassemblées autour de Chavez. Et bien qu’ils aient eu recours à toutes les tricheries possibles, malgré les 20 millions de dollars investis dans la campagne, malgré le soutien des États-Unis, des médias espagnols et ceux qui ont servi de caisse de résonance sur notre continent, les ennemis de la Révolution bolivarienne ont dû se rendre à l’évidence.
Le discours périphérique de l’opposition vénézuélienne, comme l’a qualifié le journaliste et essayiste Ignacio Ramonet, aurait pu semer la confusion chez beaucoup de gens, mais on savait aussi ce qu’il cachait : le jeu traditionnel des promesses électorales non tenues et, une fois au pouvoir, l’application de leur programme.
À présent, plein cap sur l’ALBA, participant actif au Mercosur, l’un des traités d’intégration qui pourrait donner une des plus importantes impulsions au monde au fur et à mesure qu’il se consolide. Rappelons qu’à sa première conférence internationale après sa réélection, Hugo Chavez a annoncé la Mission Mercosur, destinée à soutenir les producteurs vénézuéliens en vue de leur intégration économique à cet important groupe latino-américain.
Le Venezuela est bien plus qu’un espoir pour son peuple et pour l’ensemble de l’Amérique latine, au regard de tout ce qu’ont représenté les missions sociales dans les domaines de la santé, de l’éducation, du logement, de la culture, de l’emploi… le commencement d’un développement qui va au-delà de ses richesses en hydrocarbures – l’ « ensemencement de pétrole », comme l’a appelé un penseur vénézuélien de la première moitié du XXe siècle –, la diminution de la pauvreté.
Tous ces efforts se poursuivront, afin de consolider le socialisme et d’améliorer la qualité de vie des gens.
Comme l’a souligné le président Chavez, le 2e Plan socialiste de la nation sera soumis à l’Assemblée nationale le 10 janvier prochain, lors de la prise de fonction officielle, « pour qu’il soit discuté et adopté » (…). « Il ne faut pas perdre un seul jour », a-t-il souligné.
Tel est le mot d’ordre lancé à cette première étape. Le président a rappelé que « le manque de suivi a été l’un de nos grands problèmes ». D’où la transformation du Secrétariat de la présidence en un ministère puissant qui, entre autres, sera chargé de superviser le travail du Gouvernement bolivarien afin d’améliorer la qualité de sa gestion « sur tous les front et à tous les niveaux ».
Dans leur manie de mélanger allègrement mensonges et vérités pour cacher leur vraie nature, au Venezuela les médias et les penseurs de la droite ont procédé à une classification des classes sociales selon les lettres de l’alphabet. A et B pour désigner l’élite du pouvoir et la classe moyenne haute. Viennent ensuite les C, D et E. Mais ce sont ces trois dernières lettres qui ont fait la différence. Les couches populaires ont fait valoir leur vote, et leurs aspirations.
Soit dit en passant, les dirigeants de la droite défaite et la machine bien huilée de la grande presse mondiale – malgré leurs campagnes de discrédit contre le chavisme et son leader – sont vite passés de l’euphorie triomphaliste à la déception. Ils font maintenant appel à un langage plus mesuré pour prétendre qu’ils représentent la moitié de la population et que leurs revendications doivent être prises en compte…
Bien entendu, les écarter serait une erreur. Hugo Chavez en est conscient, et il a rappelé plus d’une fois un commentaire que lui avait fait le commandant en chef Fidel Castro lors d’une de ces élections prouvant l’esprit démocratique d’une Révolution qui s’impose aussi sur le front des urnes : ces millions de Vénézuéliens qui ont voté contre ne sont pas tous des oligarques. Aussi, il est important que le leader bolivarien ait lancé un appel à l’unité du pays pour garantir, entre tous, la construction d’un grand Venezuela sur les plans économique et social, tout en invitant l’opposition à présenter ses propositions économiques, sociales et politiques pour concevoir un projet cohérent et viable qu’il entend présenter en janvier afin d’entamer le nouveau cycle de son gouvernement jusqu’à 2019.
L’insécurité, par exemple, est un sujet amplifié et exploité par la propagande électorale réactionnaire pour créer un climat de méfiance et de terreur quant au déroulement des élections. Mais indépendamment du caractère conflictuel et politisé du débat lancé par la droite, la question sécuritaire est un phénomène qui ne saurait être ignoré et qui mérite une attention particulière, comme l’a relevé le président Hugo Chavez, lorsqu’il a annoncé la Grande mission A toda vida Venezuela, qui travaillera de manière systématique sur les manifestations de la criminalité, les problèmes d’accidents de la route et le manque de lien social à l’intérieur des communautés.
L’appel téléphonique du président Hugo Chavez à son adversaire Henrique Capriles – il avait lui aussi promis devant la presse d’appeler Chavez au moment d’exercer son droite de vote, mais ne l’a pas fait – se veut une invitation au dialogue et à la réflexion. Puisse l’opposition être animée de ce même esprit de concorde, de travail et de respect, ce qui ne signifie pas, dans le camp de la Révolution, de faire un pas en arrière. Au contraire, c’est prouver que le socialisme se fait pour tous et pour le bien du pays, d’où la nécessité de le consolider sur les plans économique, social et politique.
C’est un chemin compliqué, mais c’est la voie correcte pour que soit respectée la première autorité de la nation, le pouvoir populaire consacré par la Constitution bolivarienne, et dans la défense de la souveraineté et de l’indépendance du pays face à toute velléité étrangère d’immixtion, ou de brader les intérêts du pays.
Cependant, certains journaux ont publié des articles arrogants et manipulateurs présentant le perdant comme « vainqueur », et vice-versa. Ils sont experts en la matière, mais la réalité est sans appel. La branche la plus réactionnaire de l’opposition se berce d’illusions. Elle a du mal a digérer sa défaite et ne restera probablement pas les bras croisés.
Les élections de décembre marqueront l’introduction de changements tactiques au sein du Gouvernement. À cet égard, Hugo Chavez a annoncé deux nouvelles qui ont été bien accueillies : le ministre des Affaires étrangères Nicolas Maduro a été nommé Premier vice-président, en remplacement d’Elias Jaua. Ils sont tous deux considérés comme de fidèles collaborateurs du président, et je dirais même du peuple chaviste car Jaua sera candidat au poste de gouverneur de l’État de Miranda, l’un des plus influents du pays, et devra affronter Capriles, afin de tenter de briser la mainmise des représentants de la bourgeoisie sur ce territoire, qui soit dit en passant, a été remporté par le Pôle patriotique aux dernières élections du 7 octobre.
La victoire de Hugo Chavez dans 22 des 23 États et à Caracas devrait se confirmer également lors des élections régionales, qui constituent l’épine dorsale de la nation, ce qui requiert un grand effort de mobilisation et de sensibilisation auprès du peuple chaviste, et une bonne sélection de candidats réputés pour leur parcours révolutionnaire. La Révolution se doit d’apprendre de ses erreurs et de grandir.