La Colombie dit surmonter sa dépendance envers le Venezuela

Publié le par cubasifranceprovence

par Nazareth Balbás

traduction Françoise Lopez

Caracas, 18 Sep. AVN.- La fermeture de la frontière pose un problème oublié à l'économie colombienne. Ce soir, lors d'une réunion dans le département d'Arauca, la chancelière colombienne l'a dit clairement: "Il faut cesser de dépendre du Venezuela".

Holguin, en réunion avec le ministre de l'Intérieur, Juan Fernando Cristo et le défenseur du Peuple, Jorge Armando Otalora, a admis la réalité sur la quelle le gouvernement vénézuélien a alerté. Mais au-delà de la déclaration politique, les données - dans leur froideur - le confirment.

Le Venezuela produit 350 000 barils de combustibles par jour en moyenne. Selon les chiffres du ministère du Pétrole et des Mines reconnus par les autorités colombiennes, environ 100 000 barils d'essence et de diesel traversaient la frontière en contrebande chaque jour. C'est à dire 35% de la production nationale.

La contrebande était réalisée par les "pimpineros" qui sortent le combustible pour le revendre en territoire colombien, en particulier dans le Nord de Santander, à Arauca et à La Guajira. Cette activité d'origine illégale était "institutionnalisée" dans le pays voisin par la reconnaissance de "coopératives" qui expédient l'essence à des prix inférieurs à ceux des stations services colombiennes.

Cette situation économisait plus de 1,4 millions de barils de combustible à l'Etat colombien. Cependant, après al décision souveraine du Venezuela de fermer sa frontière jusqu'à ce que soient prises des mesures conjointes pour combattre la contrebande, la spéculation contre le bolivar, la violence et les groupes paramilitaires, le gouvernement colombien a dû commencer à envoyer 3,2 millions de gallons1 par mois (12,11 millions de litres) au Nord de Santander.

Le ministre de l'Intérieur a dit que dans cette zone historiquement négligée, la Colombie devra faire "un gros effort fiscal" puisqu'elle a décrété une "urgence économique" qui implique l'extension de l'IVA pour 3 mois à plusieurs produits dans les commerces frontaliers.

On estime que quelques 30 000 familles de tout l'axe frontalier avec le Venezuela vivent de la contrebande de combustible, un commerce hautement lucratif pour les revendeurs souterrains qui achètent 1 gallon d'essence au Venezuela à un prix équivalent à 0,144 pesos et l'expédient du côté colombien à 3 600 pesos.

Ce prix était encore attractif face aux 5 012 pesos que coûte le même gallon dans les stations services de Cucuta ou aux 8.200 pesos qu'il coûte dans la capitale, Bogota.

ainsi, alors que le gouvernement colombien évitait d'investir pour ses populations frontalières, le Venezuela perdait 1,4 millions de dollars par an, un chiffre reconnu par les autorités du pays voisin.

Un déficit d'infrastructures

Le 9 septembre dernier, le président Juan Manuel Santos a dit que son cabinet "se consacrait au renforcement économique et social dans les municipalités frontalières".

Dans l'Arauca, par exemple, le ministre de l'Intérieur a reconnu hier qu'"il y a eu absence du gouvernement colombien dans les infrastructures", ce qui a empêché ces zones de communiquer avec le reste du pays.

Si un habitant de l'Arauca veut aller à Cucuta, il préfèrera passer 5 heures sur les routes vénézuéliennes que 13 sur les routes colombiennes mal reliées entre elles, rapporte une note publiée ce vendredi par El Tiempo.

La situation des routes se répète dans d'autres entités frontalières de Colombie et a une incidence directe même sur le rythme de ses exportations.

Dans une interview au journal El Tiempo publiée le 12 septembre dernier, le maire de Cuctuta, Donnamaris Lopez a admis la dépendance envers le Venezuela pour faire baisser le prix de ses exportations de charbon: "Amener une tonne à un port colombien coûte 15 dollars de plus. Le faire sortir par Maracaibo est plus économique".

Le combustible n'est pas le seul produit sur lequel s'exerce la contrebande. Vers la Colombie sont aussi déviés des tonnes de produits que l'Etat vénézuélien subventionne pour garantir l'alimentation de ses habitants.

La Fédération Nationale des Commerçants (FENALCO), citée par le journal El Colombiano, reconnaît qu'au moins 12 000 personnes qui vivent à Cucuta fournissent des magasins en produits de contrebande: "En plus du fait qu'environ 90% de la population de la région consomme cette sorte de produits", rapporte le journal.

L'extraction de ces produits se fait, généralement, par des passages illégaux. Selon le directeur de la police des douanes et des impôts de Colombie, Gustavo Moreno, il existe environ 247 "trochas"2 qui relient les deux territoires sur un aillage commun qui couvre 2 119 km.

Un faible investissement social

Après la fermeture, le gouvernement colombien s'est vu obligé - pour la première fois - d'appliquer un plan d'investissements estimé à 1,5 billions de pesos. La semaine dernière, dans le journal El Espectador, le directeur du Département National de Planification (DNP), Simón Gaviria Muñoz, a indiqué qu'ils prendraient en urgence des mesures pour s'occuper des populations frontalières en matière de logement, d'eau, d'infrastructures routières, de santé, d'éducation et de transport.

"La crise du Nord de Santander et de sa capitale, Cucuta, est structurelle. Elle enregistre le plus fort taux d'"activités souterraines" parmi les principales zones métropolitaines du pays et le chômage y est de 14%. La production indistrielle est en dépression. En conséquence, des mesures de fond qui provoquent des transformations importantes et soutenables tout le long de la frontière avec le Venezuela sont nécessaires", a signalé Gaviria Muñoz dans un communiqué.

On estime qu'entre les municipalités de Cucuta, Villa del Rosario, San Antonio et Ureña, limitrophes avec le Venezuela, circulent quotidiennement quelques 178.000 personnes, "ce qui représente 21% de la population de la capitale du Nord de Santander", précise El Espectador.

Dans cette zone, selon les chiffres du Département Administratif National de Statistiques (DANE), presque 40% des habitants sont pauvres et 10,7% vivent dans l'extrême pauvreté.

La majeure partie de cette population traversait vers le Venezuela, en outre, pour avoir accès à des aliments subventionnés, aux services d esanté, d'éducation, entre autres bénéfices sociaux mis en place par la Révolution Bolivarienne, face à l'absence d'investissement et à l'abandon de son propre gouvernement.

Cependant, après que soit entrée en vigueur la limitation du passage en territoire vénézuélien, le gouvernement colombien a assuré qu'il investirait dans l'expansion de réseaux d'aqueducs, d’agrandissement d'hôpitaux, de construction d'écoles et de réparation de routes.

Sans dépendance

La situation de dépendance économique de la Colombie envers le Venezuela est une réalité ancienne qui fera partie inévitablement de l'ordre du jour de travail de la réunion entre le président Nicolas Maduro et son homologue Juan Manuel Santos, qui se déroulera lundi à Quito.

"Ce ne sera pas une réunion facile, ce sera une réunion complexe parce que les problèmes sont complexes", a dit Maduro mercredi.

Dans l'immédiat, les déclarations de la chancelière colombienne mettent en évidence le fait que la fermeture de la frontière appliquée par Miraflores depuis un mois a mis Nariño3 face au défi d'assumer ses responsabilités dans ses départements limitrophes: "Il faut prendre ces mesures dont nous avons besoin une fois pour toutes pour que nous, les Colombiens, vivions en Colombie et ne continuions pas à dépendre du Venezuela".

NOTES:

11 gallon= 3.785411784 litres

2passages ou sentiers illégaux

3le palais présidentiel colombien

source en espagnol:

http://www.avn.info.ve/node/320728

URL de cet article:

http://cubasifranceprovence.over-blog.com/2015/09/la-colombie-dit-surmonter-sa-dependance-envers-le-venezuela.html