Venezuela: Sur la proposition de Macri de suspendre le Venezuela del Mercosur

Publié le par cubasifranceprovence

Par: Atilio Borón (Cubadebate)

traduction Françoise Lopez

Comme il était prévu, 12 heures ne s'étaient pas écoulées depuis sa victoire électorale quand, lors de sa conférence de presse d'hier, Mauricio Macri affirma sa vocation à devenir un proche de Washington dans la région. Dans la ligne des désirs de la Maison Blanche, il a menacé la République Bolivarienne du Venezuela et confirmé qu'il demanderait la suspension de ce pays en tant que membre du MERCOSUR parce que, selon lui, il aurait enfreint la clause démocratique en "persécutant les opposants et en ne respectant pas la liberté d'expression".

Renverser le gouvernement bolivarien est une vieille obsession du gouvernement des Etats-Unis pour laquelle il n'a ni limite ni aucun scrupule. Jusqu'à présent, son offensive n'avait trouvé qu'un associé disposé à avancer sur ce chemin scabreux: le narco-politique colombien Álvaro Uribe. Juan M. Santos qui lui a succédé au Palais de Nariño ne s'est pas prêté à un jeu aussi dangereux. Mieux encore, le président conservateur colombien n'a pas cessé de remercier le Venezuela pour sa collaboration dans le processus depaix en cours à La Havane.

Macri semble ignorer ces subtilités de la politique internationale et être un homme téméraire et à la mémoire courte, une combinaison dangereuse s'il y en a. Il faudrait lui rappeler que la soumission inconditionnelle à l'empire se pratiquait déjà en Argentine sous Menem sous le nom de "relations charnelles" et que ce pays a payé par le sang un tel manque de bon sens. On ne comprend pas pourquoi il faudrait répéter erreur sauf pour respecter un accord secret avec la Maison Blanche dont nous ne tarderons certainement à connaître la contrepartie.

Macri ne semble pas non plus avoir été informé que le 28 octobre dernier, la République Bolivarienne a été réélue au Conseil des Droits de l'Homme des Nations Unies. L'Assemblée Générale de l'organisation a approuvé cette résolution par 131 voix sur 192.

Formuler les accusations que formule Macri en passant par-dessus une donnée aussi importante que celle-là, qui ratifie la présence du Venezuela dans un organisme auquel participent des pays comme la France, les Etats-Unis, l'Allemagne et le Japon, est pour le moins un acte d'irresponsabilité flagrante ou une démonstration d'amateurisme dans la gestion des relations internationales. Peut-être croit-il que les pays du MERCOSUR vont accompagner sa crise anti-bolivarienne? Ignore-t-il que les décisions du MERCOSUR demandent le consensus de tous ses membres? Pour commencer, le chancelier uruguayen Rodolfo Nin Novoa s'est empressé de déclarer que son pays "ne voit pas de raison d'appliquer la clause démocratique au Venezuela au MERCOSUR." Et le plus probable, c'est que le gouvernement brésilien suive le même chemin, auquel cas les menaces de Macri tomberaient, suite à leur infaisabilité politique.

Revenons au cas des opposants politiques au Venezuela. Que dirait Macri si ces prochains jours, suivant l'exemple de Leopoldo López, Daniel Scioli rendait public son refus de reconnaître les résultats des élections et peu après le 10 décembre, intensifiait cette campagne en mobilisant des contacts internationaux et en stimulant, avec de plus en plus de force, des violences en exigeant "la sortie" anticonstitutionnelle d'un "gouvernement illégitime" en appelant à des procédés interdits par la constitution et par les lois de la république? Appellerait-il dans ce cas Scioli "opposant politique" ou la qualifierait-il, en fonction des normes en vigueur, d'homme politique coupable du délit de sédition qui dans ce pays, encourt une peine qui va de 5 à 25 ans de prison?

La législation vénézuélienne est la même que celle de l'Argentine et les deux sont identiques à celle des Etats-Unis où ce délit est passible de peines qui, dans certains cas, vont jusqu'à la prison à perpétuité ou à la peine de mort. En réalité López, dont la femme était dimanche soir à la fête dans le bunker de Cambiemos, n'est pas un "dissident politique" injustement persécuté par le gouvernement bolivarien. C'est le chef de bande d'une tentative pour troubler par la force l'ordre constitutionnel en vigueur dans son pays et renverser le gouvernement né d’élections dont l'ex président des Etats-Unis Jimmy Carter a dit qu'elles étaient "plus fiables et transparents que les nôtres". Pour cela, il compte sur la collaboration d'Uribe pour recruter un important groupe de mercenaires qui, camouflés en héroïques "jeunes universitaires" luttaient vaillamment pour restaurer les libertés violées dans son pays.

Lancés dans les rues pour stimuler "la sortie" de Maduro et l'effondrement de l'ordre institutionnel en vigueur, ils ont fait usage de tout ce qui est imaginable en terme de violence, des incendies d'écoles et de garderies d’enfants à la destruction d'engins de transport publics et privés, tout cela combiné à des attaques violentes d'universités et de centres de santé, à l'installation de "guarimbas" (barricades à partir desquelles éteint contrôlés les mouvements de la population et étaient frappés ou assassinés impunément ceux qui osaient défier leur toute-puissance) et à des assassinats.

Suite à excès, 43 personnes sont mortes, la majorité d'entre elles étaient des sympathisants chavistes ou des membres des forces de sécurité de l'Etat. Peu après, on découvrit qu'une bonne partie des "guarimberos" étaient des paramilitaires colombiens et qu'il n'y avait presque pas d'universitaires vénézuéliens impliqués dans ces tristes événements. La justice de la "dictature chaviste" le condamna à une peine de 13 ans 9 mois 7 jours et 12 heures de réclusion. En désaccord avec la transition post-franquiste en Espagne, le 23 février 1981, le lieutenant colonel Antonio Tejero Molina voulut aussi troubler l'ordre constitutionnel en donnant l'assaut au Congrès des Députés. Dans sa croisade restauratrice "le tejerazo" ne provoqua pas une seule mort et il n'y aut à déplorer de pertes matérielles d'aucune sorte.

Cependant, la justice espagnole le condamna à 30 ans de prison, à être expulsé de l'Armée, à perdre son grade militaire et à la perte de ses droits civiques pendant le temps de sa condamnation. Personne ne l'a considéré comme un opposant politique mais comme un militaire séditieux. Le cas de López est pire à cause de la quantité de sang versé par sa faute et à cause de la destruction de biens provoquée par son apologie de la violence malgré quoi la sentence de la justice vénézuélienne a été étonnamment clémente. Mais Macri ne le voit pas ainsi et continue à le considérer comme un opposant maltraité par un pouvoir despotique. Il commence mal en politique étrangère. Et sa tentative pour avancer dans le "réformisme" néolibéral du MERCISUR est préoccupante. C'est une autre vieille ambition des Etats-Unis pour le faire rejoindre l'allance du Pacifique et l'Union Européenne dominée par la Troïka.

Source en espagnol:

http://www.cubadebate.cu/?p=664661#.VlbQRISe8RE

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